Zoland : chapitre 7

Publié le par Lou

En temps normal, je me serais confondue en remerciements, mais j’étais si troublée que je ne trouvai pas les mots justes, et le moment s’y prêtait mal.

D’un geste de la main, la vieille bibliothécaire me fit signe de partir. Je filai alors, montai quatre à quatre l’escalier et rejoignit Liu, Réaz et leurs parents à la soirée lecture.

 

En haut, la soirée lecture avait débuté. Zolu Kranak y lisait un chapitre de son dernier roman, devant un auditoire captivé. Mon arrivée dans la salle fut si discrète qu’aucun bruit ne rompit l’enchantement de la voix de l’écrivain. Je m’installai sur un des poufs rouges qui dégagea une odeur d’encens quand je m’assis dessus. Je fus alors prise comme les autres par la magie du roman.

À la fin de la soirée, j’achetai le roman avec mon propre argent de poche (je le recevais maintenant toutes les semaines, comme Liu) et le fis dédicacer par Zolu Kranak. C’est alors que je remarquai que ‘Kranak’ n’est pas un nom qui sonne très Zo. Durant le trajet jusqu’à la maison, je le fis remarquer à ma famille. Liu aussi s’en était rendu compte. Sa mère expliqua qu’on donnait le nom de ‘Kranak’ à tous les écrivains. D’autres professions avaient cette particularité, mais la plus étrange était les historiens, car seuls quatre d’entre eux avaient un nom particulier.  Ces quatre historiens transmettaient leur nom à des jeunes gens qui le transmettraient eux-mêmes, et la tradition perdurait. Ceci avait commencé bien avant la création de Zoland, mais tous les Zos ne la connaissaient pas. Les quatre historiens en question étaient comme tous les historiens, et ne parlaient pas tant de leur particularité. Lorsque je demandai quel nom on donnait à ces quatre historiens, la réponse fut un choc :

« Ils prennent le nom de ‘Karum’. Étonnant, non ? Ça ne sonne pas très Zo. »

Aussitôt après avoir entendu cette réponse, je savais que je retournerais bientôt dans les entrailles de la bibliothèque.

 

La semaine suivante, je n’eus pas le loisir de repenser à tout ça. Je commençai l’escalade avec Liu, et le collège me prit beaucoup de temps. C’est seulement le week-end suivant que je me remémorai les incidents de la semaine précédente.

Comme j’allais à la bibliothèque rendre des livres empruntés, je descendis aux archives pour revoir la vieille Zo. Quand elle arriva, la bibliothécaire lui demanda d’un ton presque agacé :

«  Tu n’en a pas appris assez la semaine dernière ?! »

Je fus déstabilisée, mais je voulais des réponses à mes questions, et je bafouillai d’un ton qui se voulait assuré :

«  Je… je ne vous ai pas… assez… remercié pour tout ce que vous avez… fait pour… moi. Mais… je… j’ai appris quelque chose… qui m’a… troublée. »

Ma voix cessa de trembler, et je pus expliquer plus clairement ce qu’on m’avait dit.

« Ah… les quatre historiens… soupira la vieille. Oui, ce sont les quatre mêmes qui connaissent l’histoire des Karums. Ce sont également les seuls à savoir ce que leur nom veut dire. Pour les autres Zos, c’est un titre à l’instar de ‘Kranak’ pour les écrivains ou ‘Onouk’ pour les boulangers…

  • Mais alors… Vous êtes une de ces quatre ! Et… moi ? Je…
  • Du calme, voyons ! l’arrêta la bibliothécaire d’un ton bienveillant. Je pensais te faire revenir ici plus tard pour tout t’expliquer, mais à ce que je vois, tu m’as devancée. Je me nomme Miamantasa Karum. Je fais partie de cette puissante famille, comme toi ou les trois autres historiens.
  • Mais il n’y a que cinq Karums ? Ou bien les autres…
  • Cesse donc de me couper la parole ! s’amusa la vieille Zo. Tu comprends vraiment tout trop vite ! La réintégration des Karums a eu lieu il y a plus de mille ans ! Au début, les Karums savaient d’où ils venaient, mais ils ont fini par vivre si normalement qu’ils en ont oublié leurs origines et leur différence. Seuls quelques uns gardaient le souvenir et transmettaient l’histoire à leurs descendants. Cette mémoire a été transmise à l’écrivain du livre que tu as lu, entre autres… puis me nombre de gens qui connaissaient encore leur histoire a considérablement diminué, jusqu’à être réduit à quatre personnes. Ces quatre personnes ont alors créé la tradition dite des Quatre, que tu connais. Mais je me fais vieille, et il me faut choisir un héritier qui recevra mon savoir. Voilà pourquoi tu as appris tant de choses à propos de ta famille. Je t’ai fait un papier officiel… il te permettra, après ma mort uniquement, de prendre connaissance de la suite du livre dont tu as déjà lu une partie. Ce sera toi, et toi seule, qui en sera la détentrice, et tu devras en interdire l’accès à quiconque ne fera pas partie des Quatre. Tu te rendras vite compte comme il est difficile de trouver un héritier. Il doit être Karum, et doit de préférence le savoir, car s’il ne peut te le dire lui-même, tu devras le repérer par tes moyens. Tu dois également savoir quelle réaction il aura en prenant connaissance de tout cela. Je n’imagine même pas la catastrophe s’il décidait de révéler tout ça à Zoland tout entier…

J’étais totalement abasourdie après ce long discours, mais je devais poser encore une question :

  • Et Maz ? Elle connaît les Karums. Est-ce une historienne ?
  • Tu as rencontré Maz ? C’est elle qui t’a emmené ici ?
  • Je prends ça pour un oui…
  • Réponds à mes questions et je répondrai à la tienne !
  • Oui, c’est Maz qui m’a conduite ici.
  • Alors tu dois savoir que Maz est une historienne elle aussi, et que ce sera ton témoin pour en devenir une à ton tour. Encore une chose ! Une lourde responsabilité pèse sur les épaules des Quatre. Une responsabilité dont tu n’as aucune idée de la nature. »

                                                                                                         À suivre...

Publié dans littérature, séries, Zoland

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L
Hey ! Comme toujours, c'est génial !J'adoooore !<br /> Une questions : les Zos ont des pouvoirs ?
Répondre
L
Merci! Oui, les Zos ont des pouvoirs magiques, et ceux des Karums sont plus puissants. Noém va bientôt découvrir les siens!